Alexis Gramblat : « Il manque un homme fort à la FFT»
Publié le 3 juin 2016 à 10H03 - mis à jour le 3 juin 2016 à 12H46Candidat déclaré à la présidence de la Fédération française de tennis, Alexis Gramblat fait office d’outsider des élections qui se tiendront en février 2017. Pour autant, l’avocat de 38 ans entend bien bousculer les certitudes de ses adversaires. Entretien.

A la lecture de votre programme, l’écoute de vos interventions médiatiques, on vous entend souvent parler d’en finir avec les affaires, d’installer une transparence totale, d’opérer un renouvellement de génération. Des thèmes chers à la classe politique française et qui recueillent l’adhésion d’une grande partie des citoyens français. N’avez-vous pas cédé à cette « mode » ?
Je n’ai pas cette impression, je constate que les affaires qui frappent la Fédération, elles existent, c’est un fait. Je le dis avec d’autant plus de force qu’à l’époque où Christian Bîmes a été condamné pour prise illégale d’intérêts, j’étais l’avocat des parties civiles. Je suis le premier à regretter que l’on retombe dans ce type d’affaires alors qu’avec l’arrivée de Gachassin, on pensait en avoir fini avec cette ère.
Vos adversaires, notamment, estiment que vous êtes le chantre du « Tous pourris ». Ilest vrai que ça peut paraître assez caricatural…
Je ne dis pas qu’ils sont tous pourris. Simplement, certains dirigeants se permettent d’enfreindre les règles depuis des années maintenant, couverts par d’autres qui ferment les yeux sur leurs agissements. Cela nuit à l’immense majorité des dirigeants qui sont honnêtes car un climat de défiance se crée dans ce contexte et les gens n’ont plus confiance.
Injecter du sang neuf au sein du Comité exécutif vous tient à cœur. Pour autant Bernard Giudiccelli, l’un de vos deux adversaires, ne souhaite pas rajeunir pour rajeunir et vous oppose l’association de compétences. Que lui répondez-vous ?
C’est au contraire fondamental ! Je pense bien sûr à des trentenaires ou des quarantenaires compétents. Jetez un œil à la moyenne d’âge actuelle du Comité exécutif, je ne l’ai pas en tête mais elle frôle sans doute la soixantaine. Cela ne correspond en rien à la moyenne d’âge des licenciés. Il y a un problème d’ouverture de ce point de vue, et je compte bien y remédier si je suis élu. Je reviendrai également sur le nombre de mandats successifs qu’un dirigeants peut effectuer. Diriger la fédération nécessite de conserver suffisamment d’enthousiasme et de fraîcheur d’esprit. Nous avons besoin de jeunes dirigeants dans la tête, pas forcément en âge. Dans mon équipe, j’ai de jeunes dirigeants qui ont également la soixantaine. Quatre ou six mandats successifs, ce n’est plus possible…
Qu’est ce qui cloche actuellement à la FFT en matière de gouvernance ?
Cela fait huit ans qu’il manque un homme fort à la tête de la Fédération française de tennis, quelqu’un qui ait une stature à la fois nationale et internationale. Pendant trop longtemps, c’est le directeur général qui a porté seul la voix de l’institution et l’a représenté à l’extérieur. La FFT a besoin d’un président élu qui travaille, connaisse ses dossiers et porte la voix de l’institution, c’en est fini des présidents fantômes.
Ce qu’il se passe actuellement à Roland-Garros, les conditions de jeu, l’agacement des joueurs et des joueuses, n’est-ce pas préjudiciable pour l’image de marque du tournoi parisien ? La « marque Paris » ?
Il faut dire que c’est une année assez particulière. Le pauvre Guy Forget fait face à une conjonction d’éléments extérieurs défavorables contre lesquels il ne peut rien…
«Le seul à connaitre le sport professionnel de l’intérieur»
Tout de même, Roland-Garros n’a toujours pas de toit sur son court central et n’est pas prêt d’en avoir un en l’état, sans parler de l’absence d’éclairage…
Concernant le toit, force est de constater qu’il est très facile d’en parler avec les conditions de jeu que l’on connait cette année à Roland-Garros. Le choix de rester sur le site historique et d’empiéter sur les serres d’Auteuil n’était probablement pas un bon choix, et les soucis rencontrés étaient donc prévisibles. Je n’ai pas eu connaissance dans le détail des autres candidatures, mais il aurait mieux convenu de délocaliser selon moi. Si l’idée était de se battre pour quelques hectares de plus, pour passer de 8,5 à 11,5, c’est idiot, on ne soutiendra jamais la comparaison avec nos concurrents du Grand Chelem sur ce terrain. J’ai également du mal à comprendre la décision de lier la pose du toit à l’extension du site, c’est tout bonnement incroyable. Un seul court couvert est prévu, pourquoi pas deux ? J’entends bien en mettre deux en place si je suis élu l’année prochaine. Des décisions judiciaires sont attendues sur ce dossier d’ici la fin de l’année. Pour l’instant mon équipe et moi-même sommes les seuls à envisager un plan B et à discuter avec les associations écologistes et bientôt de riverains au cas où des décisions seraient défavorables. Ils sont ravis d’avoir enfin droit à un véritable interlocuteur sur le sujet. Ils nous affirment qu’on n’a jamais discuté avec eux.
Quelle légitimité vous confère votre métier d’avocat (barreau de Paris et New-York) ?
Je suis le seul à connaître le sport professionnel de l’intérieur puisque dans mon activité, je suis amené à conseiller des sportifs, des événements des clubs, etc… Je suis en mesure de tenir des conférences et de négocier en anglais, aucun de mes concurrents ne peut en dire autant.
Vice-président d’un club de tennis et président de la Fédération française dudit sport, ce n’est pas tout à fait la même chose…
Les dossiers à gérer à la FFT ne me font pas peur, je pense être celui qui a les compétences pour les mener à bien. Parmi les candidats, je suis le seul joueur de tennis de bon niveau, le seul dirigeant d’un club de tennis et je siège également au comité directeur de la Ligue de Paris. Je connais les problématiques des dirigeants, des bénévoles car, moi, je suis sur le terrain quand mes concurrents sont à la Fédération depuis plus de 25 ans et ne vont sur le terrain que pour inaugurer des courts.
Vous dites d’ailleurs souvent que les clubs ne voient pas l’argent qui est censé leur être distribué par les Ligues ?
C’est une réalité, l’argent ne redescend pas. Il suffit de jeter un œil au budget des Ligues. Seulement 10 à 15% de cet argent est affecté directement aux clubs. Giudiccelli et Jean Pierre Dartevelle pensent que les clubs ne sont pas tout, mais ils ont tort. Effectivement, ce n’est pas le seul sujet de préoccupation de la fédération et il y a d’autres enjeux majeurs pour le tennis français. Mais les clubs sont le pilier de notre tennis. Ce que j’ai dit notamment concernant l’augmentation significative des montants qui leur seront reversés. C’est un engagement que je prends pour mon mandat en cas d’élection.
Le mode d’élection qui est celui de la Fédération vous est sans aucun doute défavorable et ne vous laisse que peu de chances de l’emporter. Qu’en pensez-vous ?
Je pense que c’est voulu, souhaité par ceux qui sont en place. Le système n’a pas été changé pour permettre à ceux qui sont en place à la fédération d’y rester. Ce qui ne nous empêche pas d’espérer une victoire dans un an.
Propos recueillis par Quentin Migliarini